lundi 23 janvier 2017


LEGENDE

Une cité sous-marine s'étend, ubiquitaire. Mais ne nous laissons pas tromper par les apparences. Peut-être ne s'agit-il que d'un seul et même phénomène, se déplaçant entre deux eaux, à la manière d'un immense tapis flottant, qui s'adapte au relief sous-marin sur lequel il finit par se poser.

D'audacieux aventuriers qui avaient entrepris la traversée de l'Atlantique en solitaire se sont laissé distraire par les reflets de palais fabuleux aux tourelles affleurant presque la surface de l'eau. Plus d'un s'est laissé tenter par des chants de sirènes et ces navigateurs, enclins au rêve, ont sabordé leur embarcation pour se jeter dans des bras illusoires. Ceux qui avaient réussi à garder la tête froide, le coeur sec et maintenu le cap qu'ils s'étaient fixé, ont été frappés de folie en abordant les côtes américaines. Nul crédit n'a été accordé à leurs récits.


D'autres encore, au large des chapelets d'îles océaniennes, ont péri après avoir guidé leur bateau droit sur des récifs coralliens qu'ils avaient pris pour des prairies émergées en pleine floraison printanière, îles paradisiaques où ils voulaient accoster.

Dans l'inconscient collectif, ces cités englouties glissent en silence au fond des océans, ondulant comme des méduses, se condensant en trous noirs dans les fosses abyssales avant de se redéployer intactes dans leur splendeur baroque, anémones ouvrant leurs corolles frémissantes, rétractiles, prêtes à accueillir leurs proies.

C'est le propre des légendes de n'avoir ni feu ni lieu, de se propager à trois cent mille kilomètres et des poussières (d'étoiles) par seconde, réduisant les années-lumières à quelques encablures. C'est le propre de l'être humain de croire en ces légendes.

JoH 23.01.2016



jeudi 5 janvier 2017

Un père (et passe)


Cela fait déjà longtemps que je ne pleure plus quand, dans la vie de tous les jours, je suis témoin d'un moment d'amour ou de tendresse entre un père et son enfant.

Avant, c'était toujours la même scène du film « Docteur Jivago » qui me tirait des larmes : quand la fille de Lara et de Jivago explique au fonctionaire comment elle a perdu dans la foule celui qu'elle croyait être son père (et qui n'était que son beau-père). « Il a lâché ma main ».
J'ai même écrit un mauvais poème plein de pathos sur ce thème.

Depuis des années, cette scène du film ne me fait plus pleurer.
Je ne sais pas depuis quand j'ai cessé de pleurer.

Je suis bien trop vieille pour ces balivernes.

4 janvier 2017